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Interview HAVOBA, Marie Hoël : « les problèmes vis-à-vis de la féminisation sont les mêmes pour toutes les fédérations » 

C’est quoi HAVOBA ? 

FONDATION HAVOBA 

FORMER & ACCOMPAGNER 

Le Handball, le Volley-ball et le Basketball français unis au service de l’international 

Sous l’impulsion de l’Agence Française de Développement et des Fédérations Françaises de Handball, Volley-ball et Basketball, la Fondation HAVOBA, sous égide de la Fondation du sport Français (FSF) a pour objectif de contribuer au développement de l’impact social de ces 3 disciplines sur le continent Africain. 

Les projets de Fondation HAVOBA sont déclinés en plusieurs thématiques. Parmi celles-ci, on retrouve notamment le pôle féminisation. Marie Hoël, chargée de mission Responsabilité Sociétale à la Fédération française de basket-ball et pilote du groupe féminisation au sein d’HAVOBA, nous éclaire sur ce sujet. 

Quel est votre rôle au sein de la Fondation HAVOBA ?

Au niveau d’HAVOBA, je fais partie de la composante féminisation. Je suis pilote avec Sylvie Pascal-Lagarrigue de la Fédération française de handball. Notre rôle est d’animer un groupe de référents en présentiel et en distanciel jusqu’au dernier campus en 2026. Nous avons un ou une référent.e par pays et par sport. Nous avons majoritairement des femmes sur la thématique féminisation. Au total, nous travaillons avec 18 référents. 

Quels sont les objectifs de ce pôle féminisation ? 

Plusieurs objectifs : l’élaboration ou la consolidation de plans de féminisation au niveau de chaque fédération, des temps de sensibilisation… Par exemple, nous avons créé un outil spécifique pour que les référents puissent se sensibiliser, former sur le terrain. Donc, là, c’est un outil clé en main. L’idée, c’est qu’ils et elles puissent l’utiliser sur leur territoire. Autre thème important, le travail sur le leadership des dirigeantes. L’idée serait de pouvoir accompagner des personnalités qui ont déjà des responsabilités ou qui pourraient en prendre pour, justement, peut-être en prendre plus, en tout cas, leur donner de la visibilité, créer des rôles modèles. 

Y a-t-il une différence de perception du concept de féminisation entre les fédérations françaises et les fédérations africaines ?

Les problématiques sont assez similaires, en Afrique et en France. C’est-à-dire qu’on perd les jeunes filles à l’adolescence ou que la politique ne va pas vraiment dans le sens de la féminisation. Il y a des freins que nous, on n’a pas, bien entendu. Donc, par exemple, ce que j’ai ressenti, c’est peut-être personnel, mais c’est vraiment le ressenti que j’ai eu, c’est qu’il y a aussi une disparité surtout entre la ville et ce qui peut se passer en province ou à la campagne sur les différents pays, où il peut encore y avoir, par exemple, des mariages forcés ou des choses comme cela. Donc, c’est une réalité que nous, on ne connaît pas. Malgré tout, certains ont commencé à travailler sur leur état des lieux. On leur avait dit qu’on allait travailler là-dessus au premier séminaire, et quasiment tout le monde est venu avec son premier bilan. Pour la plupart, ils avaient déjà commencé à agir. On a fait témoigner Débora Sènami Louis de la Fédération du volley béninoise. Elle nous a présenté une action qui s’appelle “Les dadas du volley”. Il s’agit d’une action de féminisation qu’elle a réussi à mettre en place malgré ​tous les freins. Dans l’ensemble, je dirais tout de même que les problèmes vis-à-vis de la féminisation sont les mêmes pour toutes les fédérations.  

Unir les fédérations, est-ce une plus-value ? 

Carrément, je pense que, pour le coup, sur cette composante-là, celle de la féminisation, on s’est rendu compte lorsqu’on les a fait travailler en sous-groupe qu’il y a les mêmes problématiques dans les trois sports. Et donc, le fait de pouvoir se connaître entre trois référents d’un même pays, ça unit les forces. Et puis, du coup, s’il y en a une, je dis une, parce que beaucoup de femmes dans ce pôle, organisent un événement, elle peut inviter les autres et donc, faire quelque chose entre les différents sports. Donc, c’est plutôt intéressant. Et même, j’ai envie de dire que dans le contexte français, on se rend compte aussi que c’est le genre de thématique où il y a un intérêt à travailler entre les différents sports. Donc, clairement, là-dessus, je pense que ça va renforcer justement la dynamique de travailler entre ces trois sports sur un même territoire. 

Petit retour en France…

Quels sont les axes de progression en termes de féminisation pour le basket français ? 

On en est à 36% de pratiquantes aujourd’hui. C’est un chiffre qui se maintient depuis quelques années. On a un objectif de se rapprocher au maximum des 40%. La réalité, c’est que ce n’est pas que forcément qu’on perd des filles, mais surtout qu’on gagne souvent beaucoup plus de garçons que de filles. C’est pour ça que ce chiffre a du mal à évoluer, mais en termes de pratiquantes, on continue d’en gagner. La différence entre les hommes et les femmes, c’est que bien souvent, on a moins de femmes qui reviennent à la pratique quand elles sont seniors que les garçons. Du coup, au niveau de la fédération, on essaie de diversifier les manières de pratiquer le basket. Il y a le 5-5 et il y a le 3-3. Le 3-3 est une nouvelle pratique qui permet parfois de conserver des pratiquantes, parce que c’est une pratique qui est moins contraignante. Plutôt que de jouer tous les week-ends, ce sont des tournois tous les deux mois, par exemple. D’autres variantes ont aussi vu le jour en ayant des finalités plus tournées vers le bien-être, comme le basket santé, le basket tonique. Par exemple, au basket santé, on a 80% de femmes pratiquantes. Il s’agit d’une réelle alternative à la pratique en compétition. Cela est assez encourageant.

Et pour ce qui est du négatif ?  

Au niveau des entraîneuses, aujourd’hui, on a encore des problématiques. Il y a juste à regarder les staffs des équipes de France. On en a conscience. Il y a un travail à faire là-dessus. C’est sûrement sur ça qu’on va de plus en plus s’axer sur les prochaines années. On a pas mal de femmes qui entraînent, mais bien souvent sur les niveaux jeunes. En revanche pour les seniors, c’est complexe, encore plus sur les seniors garçons. Bien souvent, celles qui passent le diplôme pour entraîner à haut niveau sont des anciennes joueuses de haut niveau. Pour les autres, l’idée de coacher semble moins évidente . Le but, c’est aussi de questionner toute cette pyramide pour faire en sorte que, demain, on puisse permettre à plus de femmes de pouvoir entraîner.

Il ne faut pas oublier non plus les dirigeantes. Cela fait plusieurs années que nous travaillons dessus, mais cela est loin d’être réglé. La loi de la parité a amélioré les choses certes mais pas suffisamment. On travaille pour que lorsque les femmes prennent des postes à responsabilité, il n’y ait pas une défiance ou un soupçon d’incompétence, parce qu’elles seraient potentiellement juste un quota. Il faut qu’elles soient considérées comme compétentes parce qu’elles ont gagné leur place, parce qu’elles ont les compétences pour être là et montrer que la fédération va dans cette dynamique et les soutient. Pour cela, on a créé le programme dirigeantes, on en est déjà à la quatrième édition. Dans celui-ci, on accompagne tous les ans une vingtaine de femmes à prendre des responsabilités. On utilise plusieurs temps de travail pour que les femmes se sentent légitimes à occuper des postes plus importants. En soit, cela est très similaire de ce que nous faisons avec HAVOBA parce qu’il y a vraiment de la sororité, de la cohésion qui s’est créée entre toutes ces femmes pour se soutenir et se dire, voila, on est là, on est compétente, on a pris des responsabilités dans nos fédérations et on veut changer les choses. Les choses évoluent donc, mais c’est encore loin d’être parfait. 

Fondation HAVOBA