Petit déjeuner Women Sports / Sporsora, by PwC : quand Gaëtane Thiney et Agnès Hussherr découvrent qu’elles partagent la même devise !

C’est un concept innovant créé par Women Sports et Sporsora, l’association des professionnels du marketing sportif : organiser un échange, lors d’un petit déjeuner, entre une sportive de haut niveau et une dirigeante d’entreprise. Se sont prêtées au jeu Gaëtane Thiney, l’une des leaders de l’équipe de France de football (153 sélections dont 3 Coupes du monde, 3 Championnats d’Europe, les JO de Londres en 2012), et Agnès Hussherr, Associée et membre du Comité Exécutif de PwC en France, le prestigieux cabinet international de conseil et d’audit. Les deux femmes ne s’étaient jamais rencontrées au préalable. Elles ont échangé le plus librement du monde, sous l’égide des deux animateurs de cet événement : Bruno Lalande, président de Women Sports et Magali Tézenas du Montcel, Déléguée Générale de Sporsora. Des échanges très riches. Morceaux choisis.

Par David Tomaszek – Reportage photo : Baptiste Fernandez pour Icon Sport
Extrait du magazine WOMEN SPORTS N.15 de janvier-février-mars 2020

C’est dans le cadre superbe du Shangri-La Hôtel, dans le 16e arrondissement de Paris, que s’est déroulée la première édition de ces petits déjeuners Women Sports / Sporsora by PwC. Gaëtane Thiney et Agnès Hussherr ne s’étaient jamais rencontrées, mais il ne leur a fallu que quelques instants pour se découvrir de nombreux points de convergence et même une connaissance commune ! « Nous venons de découvrir que mon cousin travaille avec Gaëtane à la Fédération française de football », annonce d’entrée Agnès, alors que le petit déjeuner n’est pas encore servi. Le ton est donné !

Malgré leurs environnements très différents (le sport / l’entreprise), Gaëtane Thiney et Agnès Hussherr ont découvert qu’elles partageaient énormément de points communs. (Photo DR/.)

Pourtant, « sur le papier », tout sépare ces deux femmes. Gaëtane Thiney, originaire de Troyes, a été repérée très jeune pour ses talents sur le terrain. Elle a refusé d’intégrer le cursus classique de formation à Clairefontaine à l’adolescence pour s’inscrire d’emblée dans un double projet : le football et les études, puis le football et un emploi. « Je m’entraînais avec les garçons, seniors, toute la semaine, et je disputais les matches le week-end avec les féminines. » Saint-Memmie Olympique sera son premier club de D1 Féminine. Elle évoluera ensuite sous les couleurs de l’US Compiègne puis du FCF Juvisy Essonne avec lequel elle décrochera le trophée UNFP de la meilleure joueuse de Division 1 lors des saisons 2011-2012 et 2013-2014. En 2017, le club cède ses droits au Paris FC. C’est le club actuel de Gaëtane, qui a par ailleurs brillé avec l’équipe de France en Coupe du monde, à l’Euro et aux Jeux Olympiques. Chez les Bleues, Gaëtane est l’une des leaders du vestiaire. Elle revendique son parcours atypique. « J’ai toujours refusé d’être pro à temps plein. J’ai toujours eu besoin d’avoir une autre activité à côté du foot. » Aujourd’hui, Gaëtane partage son temps entre son club, la FFF où elle occupe un poste au sein de la DTN et l’administration de sa société d’image pour gérer ses sponsors (Arkema, Orange, Adidas, Honda) et ses interventions en tant que conférencière. 

Un point commun : le goût de la découverte

Le parcours de l’Alsacienne Agnès Hussherr, c’est une grande école de commerce puis une carrière de 30 ans au sein de PwC, dont elle a gravi tous les échelons. Au point de faire sa place au sein du Comité Exécutif de PwC en France. PwC est un réseau spécialisé dans le conseil et l’audit qui compte plus de 276.000 personnes dans 157 pays à travers le monde : avocats, fiscalistes, experts-comptables, consultants… « En 30 ans de carrière, j’ai fait beaucoup de choses ayant changé tous les 3/4 ans de responsabilités ! Je suis depuis un an responsable Clients et Innovations avec des enjeux passionnants tels que : comment être un acteur de référence chez nos clients, comment les aider à résoudre leurs problèmes importants, ou encore : quels investissements doivent être réalisés dans la Cyber-sécurité, la Blockchain, la Data, la transition écologique ?… Auparavant j’étais en charge de « Global Human Capital Leader », c’est-à-dire responsable de la stratégie liée à nos équipes au niveau mondial : l’actif de notre réseau ce sont les talents qui le composent ! J’ai aussi été en charge du dossier de la diversité au sein du réseau, à une époque où les femmes étaient ultra minoritaires dans les postes clés. Ces différentes missions m’ont énormément apporté. J’ai développé une vision très globale des enjeux du réseau PwC. » 

« Pour évoluer, il faut sortir de sa zone de confort. » – Agnès Hussherr

Agnès Hussherr, dirigeante d’entreprise : Associée et membre du Comité Exécutif de PwC en France. (Photo DR/.)

Le point commun entre Gaëtane et Agnès, c’est le goût de la découverte du monde. « J’ai toujours été anticonformiste », raconte Gaëtane. « J’ai toujours eu le sentiment qu’il ne fallait pas aller là où l’on m’attendait. » Agnès approuve cette stratégie : « Pour évoluer, il faut sortir de sa zone de confort. » 

Quelles seront leurs prochaines aventures ? Gaëtane, 34 ans, aborde sereinement les dernières années de sa carrière sportive. « J’aimerais terminer ma carrière par une saison (six mois) aux États-Unis, dans le championnat américain. Mais je me projette déjà sur l’après football. Mon job de rêve ? Cheffe d’entreprise ! » Dans quel secteur ? La native de la région Champagne ne s’interdit aucune piste: « pourquoi pas un business dans le secteur du champagne » (rires). Agnès voit l’avenir au sein de PwC avec d’autres projets de transformation qui l’animeront toujours autant. « Le chantier est enthousiasmant. Nous avons de nombreuses transformations à entreprendre. Il nous faut être pertinents en permanence, se montrer innovants pour attirer les meilleurs talents, les conserver, emporter les équipes et en tirer le meilleur! » Agnès est aussi un symbole des femmes qui atteignent le plus haut niveau au sein du réseau et en est fière : « La part des femmes associées au sein de PwC France est passée de 11% à 25% en l’espace de 15 ans. C’est insuffisant, mais cela va dans le bon sens. »

Les quotas ? C’est plutôt non

 Faut-il en passer par des quotas pour faire avancer l’égalité hommes-femmes ? Pour Agnès comme pour Gaëtane, c’est plutôt non. « Dans le monde du foot, imposer la parité à court terme reviendrait à se priver de compétences masculines », note la leader de l’équipe de France. « Je crois plutôt à la responsabilisation du management et à la mesure fine, renchérit Agnès. Même s’il faut reconnaître que la loi Copé-Zimmermann qui a imposé la représentation de femmes au sein des conseils d’administration des entreprises a objectivement fait avancer les choses. » Sur la question du risque et de la performance, les deux femmes ont également un avis convergent, malgré leurs environnements très différents. « J’ai toujours fait les choix qui pouvaient, de l’extérieur, apparaître comme les plus difficiles, explique Gaëtane. Ce qui rend l’émotion plus forte ce sont les doutes, les souffrances, le chemin pour parvenir à la performance. A 32 ans, j’avais tout pour arrêter. J’avais disputé les JO et la Coupe du monde. Mais l’envie et le goût du challenge étaient toujours là. Ce sont les vrais moteurs. » Agnès avoue pour sa part avoir « pris pas mal de risques » au cours de sa carrière« Je parlais de diversité dans des cercles d’hommes. J’ai souvent été sur des sujets un peu nouveaux. Je ne suis pas créative au sens artistique, mais je le suis dans mon domaine ! Je n’aime pas le statu quo, j’aime quand ça bouge, quand ça change. Y compris sur des projets personnels. Par exemple, je me suis fixée le challenge de passer le brevet de pilote d’avion ! »

« Mon job de rêve ? Cheffe d’entreprise ! » – Gaëtane Thiney

Gaëtane Thiney, leader de l’équipe de France féminine de football. (Photo DR/.)

La vie personnelle, parlons-en. Comment concilier carrière et famille ? Faut-il être une « wonderwoman » ? « J’ai la chance d’avoir un mari qui m’a toujours accompagnée sans réserve dans ma carrière, raconte Agnès. Lorsqu’à été évoquée la possibilité de me demander de partir à New York, nous avions décidé qu’on s’organiserait sans qu’il ne déménage. Cele ne s’est finalement pas fait et j’ai beaucoup voyagé (environ deux semaines par mois), mes trois enfants étaient déjà grands car le plus difficile c’est quand les enfants sont petits. » Gaëtane reconnaît que pour une footballeuse de haut niveau, en France, avoir un enfant reste compliqué. « Ma coéquipière chez les Bleues, Louisa Necib, a arrêté sa carrière lorsqu’elle a eu un enfant. Les Américaines sont un peu plus cools par rapport à ça. Les nourrices sont autorisées à accompagner les rassemblements de l’équipe nationale. » La vie personnelle d’une footballeuse de haut niveau est donc objectivement contrainte par sa carrière. « On réévalue la situation familiale chaque saison. » 

Dans le vestiaire, il ne peut pas y avoir que des leaders

Autre point de convergence entre les deux femmes : l’image du « role model » féminin, avec une analyse très intéressante. « On a coutume de dire que des femmes à des postes importants peuvent en inspirer d’autres. C’est à nuancer. Ce que nous remontent les études que l’on a menées en la matière, c’est que certaines femmes peuvent être effrayées par ces « modèles » qui n’en sont pas pour elles. Ce qui est important, c’est de rendre toutes les ambitions possibles sans considérer que toutes ont les mêmes ambitions », explique Agnès. « Oui c’est tout à fait exact. Dans le vestiaire, il ne peut pas y avoir que des leaders. Certaines joueuses sont très contentes que d’autres endossent cette responsabilité », renchérit Gaëtane. 

Le petit déjeuner débat s’achève sur des sujets plus légers. Les personnalités les plus inspirantes ? Christine Lagarde pour Agnès, Zinedine Zidane pour Gaëtane qui a eu la chance de partager une formation avec ce dernier. Leurs devises respectives ? Agnès se lance la première. « Je vais citer Nelson Mandela : I never lose, I either win or learn (« Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends »). » Gaëtane saute de sa chaise (rires) : « C’est incroyable. C’est aussi ma devise ! Et je peux le prouver : je l’ai tweetée le 12 octobre 2015 ! » 

Cette devise commune n’est pas une simple anecdote. Entre une leader d’entreprise et une sportive de haut niveau, les points de convergence sont nombreux. Enchantées par cette rencontre, les deux femmes ont promis de poursuivre cet échange enrichissant sous d’autres formes. Agnès a invité Gaëtane à intervenir prochainement lors d’un rassemblement de PwC « pour qu’ils entendent ton histoire avec tes mots, sans notre jargon habituel ». Gaëtane a pour sa part invité Agnès à assister à son prochain match… et lui a tendu une perche pour l’aider dans son futur projet entrepreneurial. Message reçu cinq sur cinq : « je vais te faire rencontrer les équipes ». En football, on appelle cela une passe décisive.